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| mardi 8 décembre 2009 | Mis à jour le mardi 8 mars 2011Les pénitents blancs à Tourtour .
A côté d’autres confréries religieuses, Tourtour connaissait un groupe faisant partie du dogme des Pénitents : dans notre village, c’étaient les Pénitents blancs à cause de la couleur de leur robe (dans d’autres communes, on trouvait des pénitents bleus, gris ou noirs) . La présence des frères pénitents blancs à Tourtour date de la période 1420-1450.
En 2009, il ne subsiste que quelques pénitents à Tourtour qui ne font pas toujours pénitence (encore moins abstinence) et qui ont abandonné la robe blanche pour la plus actuelle bleu-blanc-rouge (collection UMP +) : les deux prêtres en sont Pierre Jugy et Marc Lavergne, et la prêtresse Patricia Coste, tous trois grands pénitents de par leurs fautes pas toujours pardonnées par les autorités écclésiastiques ou civiques et devant donc être expiées en séances mystiques dans des lieux tenus secrets (mais que d’aucuns soupçonnent en terre et mer tropéziennes..).
Prenons connaissance des griefs principaux qu’ils essaient de se faire pardonner (avec une probabilité assez basse qu’ils y russissent) :
" Nous, pénitents du village de Tourtour, tenons à expier nos fautes devant les forces morales et citoyennes qui nous ont portés au pouvoir et que nous avons pourtant délibérément trompées . Nous sommes coupables de mensonges éhontés, d’attaques non fondées, de promesses non tenues, de comportements perfides, d’attitudes hypocrites, d’irrespect total de nos électeurs pris pour des paysans rustres et ignares, d’une soumission entière à des pouvoirs lobbyistes dangereux , d’une tenue à l’écart de l’information collective.... Nous faisons pénitence de ces fautes et nous nous engageons à réagir en faveur de ceux qui ont été nos électeurs et nous promettons de mieux choisir ceux que l’on a cru nos amis mais qui nous séparent en fait des véritables valeurs qui fondent la vie de notre village ... Que les coups de fouet nous réveillent enfin ! " .
On verra la suite...
Au début du XVIII ème siècle (en 1719) les pénitents blancs de Tourtour se heurtèrent au seigneur de Raphélis (dont la famille a pourri la vie des habitants durant quasiment deux siècles) : les pénitents se réunissaient dans la chapelle de la Sainte-Trinité car ils ne voulaient pas officier à Saint-Denis et ils décidèrent que des travaux de restauration étaient nécessaires . Juste à côté de l’autel, le banc "résevé" à De Raphélis se situait à l’endroit prévu des travaux et le seigneur refusa que l’on touche à son banc personnel . Les pénitents refusèrent donc de confier la clé de la chapelle et le vicaire ne pouvait plus venir y servir la messe (quand le froid était trop vif ou la pluie trop forte pour officier à l’église du haut du village). Le seigneur, sûr de son pouvoir absolu, s’adressa à la Communauté (l’équivalent du conseil municipal) mais la délibération ne lui fut pas favorable car le consul décida que la clé devait être confiée au curé quand celui-ci le désirait mais également que les frères pénitents pouvaient effectuer les travaux sans s’occuper du banc qui n’était en aucune façon un privilège que pouvait revendiquer le sieur De Raphélis.
Quelle était la particularité de cette confrérie des pénitents ?
Le mot pénitent vient du latin paenitens qui est le participe présent du verbe paenitere : se repentir. C’est l’état d’une personne qui se présente au prêtre pour confesser ses péchés et recevoir le sacrement de la pénitence.
Au IV° siècle, il y avait quatre catégories de pénitents :
les pleurants : restaient à la porte des églises
les écoutants : restaient dans le vestibule,
les prosternés : avec les catéchumènes, n’assistaient qu’à la première partie de la messe
les consistants : se mêlaient aux fidèles mais ne pouvaient participer à l’Eucharistie.
La pénitence publique fut remplacée ensuite par des aumônes ou des fondations pieuses. Au V° siècle, voire même plus tôt, des hommes et des femmes, célibataires ou mariés, se regroupent et adoptent les conditions de vie imposées par la discipline canonique aux pêcheurs publics officiellement réconciliés :
- port d’un habit spécial,
- pratique régulière de la prière,
- plus stricte observance de l’abstinence et du jeûne,
- renoncement aux fêtes mondaines.
(on s’aperçoit qu’avec les deux dernières conditions, il est peu probable que nos pénitents de 2009 puissent continuer à appartenir à la confrérie..).
Aux XII°, XIII° et XIV° siècles, l’autorité de l’Eglise fut fortement discutée. Au nord de l’Italie, une association pieuse d’artisans de la laine nait à Milan en 1178. Appelés les "humiliés", les membres de cette association étaient des travailleurs laïcs mariés qui avaient choisi de pratiquer la pauvreté volontaire et de prêcher la pénitence. Ils portaient, par simplicité, des vêtements de gros drap gris et prétendaient amorcer un retour à l’église primitive.
La plupart des humiliés se réconcilièrent avec l’église et furent reconnus en 1201 par le pape Innocent III.
Au XIII° siècle, toujours en Italie, se créèrent des groupes appelés les "flagellants". Ils allaient de village en village en portant la croix, le torse nu et en se flagellant jusqu’au sang en chantant des cantiques. Outre ces pratiques, ils assuraient l’ensevelissement des morts dans les villages (à titre gratuit).
Cependant, dès 1349, le pape Clément VI interdit les expéditions des flagellants. C’est au XIII° également que naquirent les ordres mendiants : leur règle imposait la pauvreté, non seulement des individus, mais des couvents.
Le concile de Trente permit aux ordres mendiants d’acquérir des revenus, tout en maintenant l’interdiction de faire des bénéfices ecclésiastiques. A cette même époque, Saint François d’Assise et ses premiers disciples se nomment "les pénitents d’Assise" avant de se constituer en ordres religieux proprement dits. En 1209, Saint François instituait le premier tiers Ordre séculier (dit de Saint François). Constitué de laïques, hommes et femmes, ce tiers Ordre est une sorte de congrégation civile dont les membres, tout en vivant dans le monde, même dans le mariage, s’obligeaient à mener une vie vraiment chrétienne et à observer la règle de Saint François, autant du moins que les exigences de la société pouvaient le leur permettre.
Du point de vue religieux, les membres de ces confréries étaient soumis aux mêmes pratiques que les moines, chantaient les mêmes offices, suivaient les mêmes rites et exerçaient à l’égard les uns des autres des principes de solidarité uniquement basés sur la foi chrétienne.
Très tôt, ils se consacrèrent aux bonnes oeuvres : la charité d’abord, soit par simples aumônes soit par fondation puis, après, la charité orientée vers les autres pénitents, charité interne qu’est l’entraide mutuelle. De toutes les obligations de charité, la principale était l’aide apportée à un pénitent au moment de sa mort, aide morale pour l’aider au passage dans l’au-delà, et l’une des obligations les plus suivies par les pénitents, et la mieux réglée était celle qui s’exerçait à l’occasion des obsèques, les pénitents s’obligeant à porter en terre leurs confrères décédés.
Plus tard, ils se chargèrent également d’ensevelir les morts non pénitents, pratique assurée antérieurement par les flagellants dont bon nombre rejoignirent les confréries de pénitents.
L’égalité des frères se montrait surtout concrètement par le port de l’habit de pénitent qui leur servait d’uniforme dans les processions et lors des manifestations cultuelles.
Il existe encore aujourd’hui des confréries de pénitents dans le midi de la France, en Italie, en Espagne et en Belgique (Fumes). Ces pénitents ont tous un même rite et portent un habit similaire composé du sac (la livrée), de la cagoule ou du camail et du cordon.
Les confréries n’ont-elles que des hommes comme membres participants ? Non, les femmes sont admises dans certaines des confréries, notamment celles des pénitents blancs de Mèze en 1808, des Pénitents Gris d’Aiguës Mortes dans laquelle on dénombrait 24 femmes entre 1796 et 1815 et 18 entre 1892 et 1933 (soit près de 10% de l’effectif) et, plus récemment, celle des Pénitents Noirs de Nice. Les femmes participent plus particulièrement aux actions de bienfaisance des confréries et à leurs activités chrétiennes.
Comment devient-on pénitent ? Par cooptation, par tradition familiale ou régionale. Nul n’est membre par sa fonction, par son âge ou par son métier, mais seulement parce qu’il l’a voulu.
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